2 approches de l’hydrolienne très différentes font parler d’elles ces derniers jours :
- Une conception d’hydrolienne exemplaire par sa simplicité avec pour la première fois en France, une hydrolienne immergée en pleine mer qui a été directement relié au réseau insulaire de l’île d’Ouessant.
- Une approche expérimentale innovante basée sur le biomimétisme promet des rendements avec des courants inférieures à 1 m par seconde.
Ouessant, une première en France
Une hydrolienne immergée en pleine mer injecte du courant électrique au réseau insulaire de l’île d’Ouessant depuis le jeudi 5 novembre. C’est une première en France.
C’est l’hydrolienne D10 de Sabella (société quimperoise) qui a été installé avec une puissance nominale de 1,1 MW pour un courant de 4 m/s. Elle se démarque des autres hydroliennes déjà raccordées dans d’autres pays ou en projet de raccordement en France par sa simplicité.
« La concurrence de Sabella a tendance à vouloir faire de « l’éolien dans l’eau ». Leurs éoliennes sont plus complexes et accusent davantage de problèmes de maintenance dans la durée, » explique Jean-Christophe Allo, chef de projet chez Sabella.
« Nous avons quant à nous simplement cherché comment capter l’énergie du courant. Nous avons opté pour une machine la plus simple possible, sans mettre en œuvre des cinématiques complexes ». Ainsi la machine n’a-t-elle pas de boîtes de vitesse et fonctionne de manière fixe, que le courant vienne de derrière ou de devant. Aussi la Sabella D10 (hélice de 10 mètres de diamètre) n’a-t-elle besoin de maintenance que tous les 8 à 10 ans. La maintenance est un poste un très coûteux car il faut ramener les turbines au port, et sur lequel il reste beaucoup d’inconnues. Si la turbine est simple de conception, Sabella a fait le choix de l’équiper de nombreux capteurs pour minimiser les coûts de maintenance : vibration, température, vitesse de rotation, tension, ampérage. Les données sont transmises en temps réel. Un deuxième type d’instrumentation mesure l’impact environnemental de l’installation.
Pour des raisons de robustesse du réseau, l’hydrolienne ne pourra injecter que 250 kW dans le réseau d’Ouessant mais reste compétitive par rapport aux solutions diesel. Dans le cadre d’une ferme pilote, Sabella, en partenariat avec Engie, prévoit d’ici 2019 l’immersion de deux autres machines, D15 (2,5 MW pour un courant de 4 m/s) cette fois, destinées à couvrir plus de 50 % des besoins de l’île (contre 15 % avec la D10). Des projets à l’export sont prévus en Indonésie et aux Philippines. Sabella se prépare également à répondre à de grands appels d’offres pour 2022-2025, quand pourraient être installées des fermes d’hydroliennes, à l’instar des fermes d’éoliennes offshore attribuées ces dernières années.
Une hydrolienne à membrane qui ondule pour imiter les poissons
Une hydrolienne à membrane ondulante pour produire de l’électricité à partir des courants marins vient d’être mise au point par la start-up EEL Energy dans le bassin de l’Ifremer.
La technologie est basée sur le biomimétisme. Dans la nature marine, les systèmes à hélice sont en effet inexistants, les mouvements des animaux aquatiques étant presque tous basés sur des ondulations. La membrane reproduit ces mouvements d’ondulation. La déformation de la membrane permet ainsi de générer de l’énergie hydrocinétique, ensuite transformée en électricité grâce à des dynamos innovantes. Elle permet de produire de l’électricité avec des vitesses de courants inférieures au mètre par seconde, même si l’optimum de production d’électricité, soit 1 mégawatt, est obtenu avec une vitesse de fluide de 2,5 mètres par seconde.
Selon EEL Energy, l’hydrolienne à membrane ondulante de 15 x 15 mètres oscille sur une amplitude de 1,5 mètre. Elle limite largement les impacts sur les courants marins par rapport à une hélice de turbine de 15 à 18 mètres de diamètre modifiant les courants sur une colonne d’eau horizontale. Toujours selon la start-up, le faible encombrement – 225 m² tout de même ! – de la membrane pourrait ainsi être placé près des côtes afin de réduire les coûts de raccordement au réseau électrique continental et d’avoir, sur une même surface, 10 fois plus de machines installées qu’avec une turbine. « 1 000 fois plus d’emplacements potentiels qu’avec les turbines, sur des courants allant de 1 à 3 mètres/seconde », souligne Franck Sylvain, directeur financier d’EEL Energy. Quand les technologies classiques ne permettent de récupérer de l’énergie qu’avec un minimum de flux d’eau de 3 m/s et de flux d’air de 6 m/s. Enfin, la membrane réalisée par Hutchinson est dans un latex naturel résistant aux déchirures et aux abrasions et sur lesquels les organismes marins ne se fixent pas.
Des essais ont été réalisés sur un prototype à l’échelle 1/6e le 30 juillet dernier dans un bassin d’essais à Boulogne-sur-Mer dans le cadre du projet mené par EEL Energy – créé en 2011 par Jean-Baptiste Drevet – l’Ifremer, Bpifrance et Hutchinson. La première hydrolienne EEL sera déposée en 2017 au large de l’Ecosse. Puis la production de l’hydrolienne, prévue en 2018, sera assurée par les sites de production français de Hutchinson.